L’article 47 de la Loi sur les banques doit être révisé!

Les journalistes risquent toujours des poursuites pénales s’ils publient des informations issues de fuites bancaires. Ce climat dissuade désormais aussi les professionnels étrangers, qui évitent de se rendre en Suisse. investigativ.ch appelle à une révision urgente de la loi.

«J’ai décidé de ne plus me rendre en Suisse», déclare Antonio Baquero, coordinateur de la plateforme européenne d’investigation OCCRP. En 2022, il a participé à la publication des «Suisse Secrets», une investigation internationale portant sur plus de 100 milliards de francs suisse détenus par 30 000 clients du Crédit suisse. «D’autres collègues se montrent également prudents. Je ne pense pas que les autorités suisses m’arrêteraient, mais je ne veux pas courir le risque d’être retenu et interrogé», a-t-il confié au Tages-Anzeiger.

Selon l’article 47 de la Loi fédérale sur les banques, les journalistes s’exposent en Suisse à des poursuites pénales passibles de jusqu’à trois ans de prison ou d’une amende s’ils publient des informations issues de documents bancaires confidentiels. Cette disposition légale a suscité une vive prise de conscience avec la publication des «Suisse Secrets», plus de 160 journalistes du monde entier – mais aucun Helvète – y ont participé.

Comme l’a révélé le Tages-Anzeiger la semaine dernière, cette loi semble désormais dissuader aussi les journalistes étrangers. Plusieurs figures renommées de l’investigation renoncent à mettre un pied sur le territoire. «Le fait que les rédactions suisses soient ainsi fortement limitées dans leur travail d’information et que les journalistes étrangers se voient même empêchés d’entrer en Suisse constitue une restriction inacceptable de la liberté de la presse», alerte l’organisation Reporters sans frontières Suisse.

D’après le Tages-Anzeiger, plusieurs expertises juridiques confirment ce risque. La banque genevoise Reyl est apparemment déjà passée à l’action: à la suite d’un reportage critique, ses avocats ont adressé une lettre agressive aux cinq journalistes, avec la menace d’une plainte pénale pour violation du secret bancaire, rapporte encore le Tages-Anzeiger.

Il est inacceptable que les médias ne puissent remplir leur rôle démocratique essentiel sur un sujet aussi crucial pour la Suisse, place bancaire internationale, sans craindre des poursuites pénales. Le public a le droit d’être informé.

Invitation à notre conférence annuelle 2025

Repensons le journalisme d’investigation

Cela fait 15 ans qu’investigativ.ch s’engage pour des enquêtes approfondies et un journalisme indépendant. Plutôt que de regarder dans le rétroviseur pour fêter cet anniversaire, nous avons décidé de nous tourner vers l’avenir en explorant des formes de narration innovantes, des nouvelles perspectives et des impulsions pour le journalisme d’investigation.

Des expertes et experts reconnus comme Derek Bowler (spécialiste OSINT), Jake Rees (Centre for Investigative Journalism), Cécile Tran-Tien (RTS), Christian Zeier (Reflekt), Eric Burnand (Berne, nid d’espions) et Denise Brechbühl (Une prostituée raconte) partageront leur précieuse expérience. Martin Stoll, membre fondateur d’investigativ.ch, reviendra sur l’évolution de notre réseau d’enquête. Et, lors d’une table ronde qui s’annonce des plus intéressantes, Camille Krafft, Boris Gygax et Michael Bolliger se pencheront sur cette question fondamentale: comment rendre compte de manière plus vivante des enquêtes journalistiques?

Venez puiser de l’inspiration, découvrir de nouvelles manières de raconter des enquêtes et échanger avec des consœurs et confrères. Nous nous réjouissons de vous accueillir!


Date
: Vendredi, 9 mai 2025

Lieu: salle Unionssaal au Best Western Hotel Bern (7 min de la gare; Zeughausgasse 9, 3011 Berne)

Horaire: Assemblée générale à partir de 13h15, conférence annuelle de 14h15 à 18h00, suivi d’un apéritif.

PROGRAMME

13h15Assemblée générale (uniquement pour les membres)
14h00Accueil
14h15Exposé de Martin Stoll
en allemand
15 ans d’investigativ.ch: membre fondateur de notre réseau d’enquête, Martin Stoll revient sur ses débuts et propose une analyse de l’évolution du journalisme d’investigation en Suisse. Journaliste d’enquête de longue date, il soutient aujourd’hui les professionnels des médias à travers son association Loitransparence.ch et reste actif au sein d’investigativ.ch, du comité de laquelle il est doyen de fonction.
15h00-15h45Ateliers:

– UnionssaalL’art rencontre l’investigation
en anglais
Jake Rees du Center for Investigative Journalism parle de son propre projet: le Center for Artistic Inquiry and Reporting (CAIR). Lors d’un atelier exclusif, nous apprendrons comment les méthodes artistiques peuvent ouvrir de nouvelles perspectives aux journalistes d’investigation et enrichir les récits d’enquête. Animation: Anielle Peterhans

– Saal Adrian FrutigerBD: comment raconter des enquêtes par le dessin
en français et en allemand
Sa grande enquête a donné naissance à une bande dessinée: Berne, nid d’espions. Le journaliste Eric Burnand raconte comment il a créé, avec un illustrateur, le livre sur l’affaire d’espionnage impliquant le procureur général de la Confédération René Dubois pendant la guerre froide. La journaliste Denise Brechbühl a enquêté dans le domaine difficile de la prostitution et de la violence. Son travail n’a pas été publié sous forme d’article, mais, grâce à une illustratrice, sous forme de bande dessinée dans Das Magazin de Tamedia. Avec eux, nous parlons des opportunités que le roman graphique représente pour le journalisme. Animation: Dominique Botti et Eva Hirschi
15h45-16h15Pause café
16h15-17h00Ateliers:

– UnionssaalAtelier OSINT avec Derek Bowler
en anglais
This fast-paced 45-minute session by Derek Bowler (Head of Social Newsgathering | Eurovision News) provides a rapid overview of key OSINT techniques tailored for investigative journalists. We’ll cover essential tools and strategies for quickly verifying online information, including image and video analysis, social media investigation, and geolocation basics. You can expect practical tips and real-world examples to boost your journalistic toolkit. Perfect for journalists and researchers seeking to enhance their digital verification skills in a limited timeframe.

– Saal Adrian FrutigerLa piste du making of
en français et en allemand
La RTS a lancé un nouveau format sur Youtube: dans Vraiment, la journaliste Cécile Tran-Tien emmène le public dans ses enquêtes et ne parle pas seulement de ses résultats, mais montre aussi comment elle mène ses enquêtes. Christian Zeier de l’équipe d’enquête Reflekt explore le format vidéo pour les médias sociaux: il transforme de longues enquêtes en courtes vidéos humoristiques dans lesquelles l’animatrice Gülsha Adilji explique des contenus complexes. Avec Cécile Tran-Tien et Christian Zeier, nous parlons du potentiel de ce type de récit – et nous leur demandons si les journalistes doivent devenir des influenceurs ou des youtubeurs.
Animation: Laura Drompt et Eva Hirschi
17h00Table ronde: comment donner vie aux enquêtes journalistiques?
en français et en allemand

Bandes dessinées, livres, web-séries, podcasts – les enquêtes ne doivent pas forcément être racontées sous forme d’articles classiques. De nouveaux formats offrent des approches intéressantes pour rendre des histoires complexes accessibles et captivantes. Mais qu’est-ce qui rend un média particulièrement efficace? Quand une bande dessinée est-elle plus appropriée qu’un documentaire? Comment naissent de nouvelles formes de narration, et où trouver l’inspiration? Et comment ces approches permettent-elles d’attirer de nouveaux abonnés et abonnées? Participent à la discussion: Camille Krafft (autrice et journaliste, Blick Romandie), Michael Bolliger (concepteur de storytelling et monteur, SRF Investigativ), Boris Gygax (responsable des nouveaux contenus numériques, Tamedia)
Animation: Sven Altermatt et Eva Hirschi
18h00Apéritif

 INSCRIPTION

Le nombre de places pour la conférence annuelle est limité. Merci de vous inscrire rapidement.

Coût: 25.- pour les membres, 50.- pour les non-membres (à verser sur CH51 0900 0000 8506 3384 1).

MV & Jahreskonferenz 2025
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Ich nehme am anschliessenden Apéro (um 18 Uhr) teil. / Je participe à l'apéritif (à 18h).
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SAVE THE DATE: AG & conférence annuelle le 9 mai 2025

La date de la prochaine assemblée générale et conférence annuelle d’investigativ.ch est fixée: nous nous retrouverons le vendredi après-midi 9 mai 2025, à Berne. Nous sommes en train d’élaborer une fois de plus un programme passionnant et, nous l’espérons, instructif avec des invité-e-s renommé-e-s, des ateliers, des discussions et un apéritif de réseautage! Notez déjà la date dans votre agenda, plus d’informations suivront bientôt.

Prise de position sur la révision de la loi sur l’aviation

Dans le cadre de la procédure de consultation sur la loi sur l’aviation (LA), investigativ.ch a déposé une prise de position au nom des journalistes d’investigation de Suisse.

Fondée en 2010, l’association investigativ.ch, qui regroupe environ 300 journalistes, s’engage pour la liberté de la presse et de l’information ainsi que pour de bonnes conditions d’investigation. L’accès sans entrave aux informations officielles, fondé sur le principe de transparence, constitue un outil de travail important pour les journalistes: il leur permet de vérifier les déclarations de l’administration et de comprendre son travail. La présente révision de la loi sur l’aviation (LA) vise toutefois à restreindre fortement le champ d’application de la loi sur la transparence. Nous nous permettons d’aborder ci-après les aspects de la liberté d’information et de la transparence dans le projet en discussion et d’exposer le point de vue des journalistes sur ce sujet.

Selon l’article 107d dans le présent projet de loi, les rapports sur les audits, inspections, expertises et contrôles des organisations surveillées par l’OFAC ne seront plus accessibles au public à l’avenir. Les rapports et documents relatifs à des événements transmis à l’OFAC conformément au règlement européen 376/2014 devront également être exclus du principe de transparence. Il en va de même pour les documents de l’organe suisse d’enquête de sécurité (SUST). Cela entraîne une limitation massive de la transparence dans le contrôle aérien, un domaine qui concerne directement une grande partie de la population.

Un contrôle efficace des autorités étatiques n’est toutefois garanti que par la divulgation – c’est également la conclusion à laquelle est parvenu le Tribunal fédéral. En 2017, dans un arrêt qui fait jurisprudence (1C_428/2016), il a obligé l’administration à exercer une surveillance transparente sur les transports publics et a rejeté une clause de confidentialité prévue dans la loi sur les chemins de fer. Il s’agit d’éviter la mise en place d’un «système de copinage», dans lequel les déficits et les dysfonctionnements sont négociés en secret entre les personnes directement concernées, ce qui mine la confiance envers les autorités de contrôle.

Dans le cas actuel, un tel secret serait également problématique. La mise à l’écart du principe de transparence empêche une surveillance parallèle indépendante par les citoyens, les médias et les spécialistes, comme le prévoit le principe de transparence actuel. Les rapports périodiques prévus par l’OFAC ne remplacent pas le principe de transparence supprimé. Une telle restriction a pour conséquence que des irrégularités peuvent être dissimulées et que les contrôles étatiques ne sont pas suffisamment vérifiés, ce qui fragilise à long terme la confiance en l’administration et l’efficacité de la fonction de surveillance.

En outre, le Parlement a exprimé dans le programme de législature actuel qu’il n’était pas satisfait de la mise en œuvre courante de la loi sur la transparence. L’article 9, objectif 8, chiffre 52ter, stipule la «suppression des obstacles d’accès de nature formelle et financière à l’octroi du principe de transparence de l’Etat». Il est inquiétant de constater que le principe de transparence sera encore davantage limité ici. Selon l’association Loitransparence.ch, il existe déjà une trentaine d’exceptions. Nous sommes d’avis que les mécanismes de protection prévus dans la loi sur la transparence ainsi que dans d’autres lois, dont la loi sur l’aviation, suffisent amplement à garantir des contrôles efficaces. La loi sur la transparence reste ici un élément indispensable pour renforcer la confiance du public envers les autorités.

Nous vous demandons de supprimer l’art. 107d de la loi sur l’aviation afin de garantir la transparence dans l’administration, un acquis largement accepté par le peuple, également dans ce domaine important.

Sabot d’or 2024: Les nominé-e-s!

Qui mérite le Sabot d’or 2024 pour la plus grande entrave à l’information? Comme chaque année, le comité d’investigativ.ch a sélectionné les trois meilleurs candidats parmi vos nombreuses propositions.

  • Attaque parlementaire: les politiciens Thierry Burkart et Alex Kuprecht
  • Justice à la traîne: le Tribunal genevois de première instance
  • Sabordage de scoop: le porte-parole de Coop, Kevin Blättler

Tous les membres d’investigativ.ch peuvent voter. Ils ont reçu un courriel à cet effet.

Attaque parlementaire

L’affaire des «Suisse Secrets» autour de Credit Suisse a montré que la liberté de la presse devait être renforcée dans la loi sur les banques afin de permettre des enquêtes sur des données sensibles. La commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) a fait exactement le contraire: elle a demandé au Conseil fédéral, par le biais d’un postulat, d’examiner si la publication de «données obtenues et collectées de manière illicite» devait être punissable à l’avenir. Les données bancaires seraient non seulement concernées, mais aussi toutes les informations confidentielles avec lesquelles les journalistes d’investigation travaillent. Les principaux responsables de ce postulat sont l’ancien conseiller aux Etats Alex Kuprecht (UDC, Schwyz), qui était le président de la commission en question à l’époque et un des initiateurs du postulat, et Thierry Burkart (AG), chef du groupe libéral-radical au Parlement qui a assuré lors du débat que l’on ne voulait pas restreindre davantage la liberté de la presse. En dépit des critiques d’experts et d’une lettre ouverte de protestation de notre réseau d’enquête investigativ.ch signée par plus de 600 journalistes, le Conseil des Etats a approuvé cette intervention hostile à la presse. Le Conseil fédéral a jusqu’à la fin 2025 pour élaborer un rapport.

Extrait de la prise de position de Thierry Burkart:

Les citoyennes et les citoyens ont le droit d’exiger que leurs données personnelles sensibles soient protégées. Il en va de même pour les PME suisses qui sont de plus en plus souvent à la merci des attaques des cybercriminels. La liberté de la presse est un bien précieux. La protection contre les maîtres-chanteurs l’est également. Le Parlement n’a pas demandé de restriction au Conseil fédéral, mais uniquement un rapport sur la manière dont ces biens juridiques importants pourraient être conciliés. Il s’agit donc d’une pesée d’intérêts entre la protection des données personnelles et l’intérêt légitime de l’enquête journalistique. Les médias critiques, qui ne veulent pas se laisser instrumentaliser par les cybercriminels, devraient également avoir un intérêt intrinsèque à une telle pesée d’intérêts.

Nomination & prises de position détaillées

Justice à la traîne

La banque en ligne genevoise Flowbank s’était massivement surendettée. Le journal économique et financier L’Agefi voulait attirer l’attention sur cette situation. Mais par une mesure superprovisionnelle, la justice genevoise a interdit au média de publier son article. Pendant huit mois. Ce n’est qu’en juin de cette année que L’Agefi a pu remettre en ligne les deux articles initiaux, la Cour d’appel ayant donné raison au média. Mais à ce moment-là, la Finma avait déjà contraint la banque en ligne à fermer. Au lieu d’avertir à temps les clients de la faillite qui se profilait, le Tribunal civil de première instance a empêché la transparence. Et ce bien que les articles se soient fondés sur le rapport annuel de la banque (qu’elle est de toute manière légalement tenue de publier) ainsi que sur un rapport d’audit. La légèreté avec laquelle de telles mesures provisionnelles peuvent être ordonnées est extrêmement inquiétante. On connaît d’autres cas (opération d’espionnage du Qatar contre des fonctionnaires de la Fifa, producteur de pétrole et de gaz Addax) dans lesquels le Tribunal civil de Genève a muselé les médias – mais ceux-ci ont finalement obtenu gain de cause.

La réponse: Le Tribunal genevois de première instance renonce à prendre position.

Nomination détaillée

Sabordage de scoop

Lorsque le journaliste économique Beat Schmid, fondateur du média en ligne tippinpoint.ch, a appelé le service de presse de Coop, il aurait pu s’attendre à une réponse exclusive. Beat Schmid avait appris que Coop allait supprimer l’application financière Finance+ après quelques mois; il voulait vérifier l’information auprès du service de presse. Le directeur adjoint du service de presse de Coop Kevin Blättler a laissé entrevoir une réponse pour l’après-midi. Par mail, il a finalement renvoyé Beat Schmid au lendemain. Mais au lieu d’une réponse personnelle, le journaliste a reçu un «communiqué de presse qui vient d’être publié». Coop a profité de l’enquête et de la demande du journaliste pour communiquer l’échec de l’application financière sous la forme d’un communiqué de presse. Un tel procédé enfreint les règles de l’équité et nuit à la relation entre les journalistes et les services de communication. Les journalistes doivent avoir la certitude qu’ils ne seront pas privés du fruit de leur travail. Ce comportement ne nuit pas seulement à la réputation de l’entreprise, mais aussi à l’ensemble du secteur de la communication. Qui confie encore ses éléments à un service de presse s’il y a un risque que des informations importantes soient retenues pour des raisons inexpliquées?

Extrait de la prise de position de Kevin Blättler:

Dans ce cas spécifique, nous avions malheureusement les mains liées. Après un examen approfondi, les changements intervenus chez Coop Finance+ ont été considérés par un partenaire coté en bourse comme potentiellement significatifs pour les cours. En procédant de la sorte, nous avons garanti, dans le cadre du partenariat, qu’il puisse satisfaire pleinement à l’obligation de publication prescrite par la loi. Il n’a donc pas été possible de répondre préalablement à la demande des médias.

Nomination & prise de position détaillées

Libération d’Assange: pas une victoire pour le journalisme d’investigation

La libération du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, est une bonne nouvelle. Son extradition aurait créé un dangereux précédent. Mais qualifier cela de victoire historique pour la liberté de la presse, comme le font de nombreuses organisations, est une erreur.

Au contraire: la liberté de la presse ne supporte pas les accords avec les autorités publiques.

Pour avoir mis en lumière des documents importants d’intérêt public, Julian Assange a été incarcéré pendant cinq ans dans une prison de haute sécurité – sans jugement, dans des conditions difficiles. C’est inacceptable pour un État de droit qui reconnaît la liberté de la presse comme un droit fondamental.

La publication de documents secrets prouvant une irrégularité fait partie du journalisme d’investigation et est fondamentale pour une démocratie. Personne ne devrait passer ne serait-ce qu’un seul jour en prison pour la publication d’informations d’intérêt public.

La libération de Julian Assange ne nous dispense pas de l’obligation de réfléchir à la manière de traiter éthiquement les informations potentiellement sensibles. En particulier, la question de savoir si la publication d’informations secrètes peut mettre en danger des vies humaines doit être prise en compte dans les réflexions sur la publication. Cela concerne aussi bien le traitement des informations secrètes et sensibles par les professionnels des médias que le traitement des lanceurs d’alerte par les médias.

Eva Hirschi, directrice d’investigativ.ch

Anielle Peterhans renforce le comité d’investigativ.ch

Lors de l’assemblée générale du réseau d’enquête investigativ.ch, Anielle Peterhans, reporter à la cellule enquête de Tamedia, a été élue au comité. La conférence annuelle qui a suivi a porté sur le thème de l’enquête sous couverture.

Lors de la conférence annuelle d’investigativ.ch, qui s’est tenue vendredi après-midi à Berne, une cinquantaine de journalistes de toute la Suisse se sont réunis pour échanger sur les méthodes d’investigation. Cette année, le réseau d’enquête s’est penché sur un sujet controversé: le journalisme undercover (voici le retour sur la conférence).

Lors de l’assemblée générale qui a eu lieu en amont de la conférence annuelle, l’association a présenté projets en cours. En outre, des changements de personnel ont eu lieu au sein du comité. Le réseau d’enquête investigativ.ch se réjouit d’avoir trouvé en Anielle Peterhans une journaliste d’investigation engagée et expérimentée pour rejoindre le comité. Anielle Peterhans est reporter à la cellule enquête de Tamedia et travaille dans le journalisme depuis 2018. Elle se concentre aujourd’hui sur la mise en évidence de dysfonctionnements sociopolitiques – notamment dans les domaines de l’extrémisme, de la migration et du sexisme.

Anielle Peterhans a étudié les sciences politiques et l’histoire contemporaine à Zurich et Göteborg et est diplômée de l’école de journalisme MAZ à Lucerne. Parallèlement à ses études, elle a effectué des stages dans la rubrique politique de 20 Minuten et à la «Rundschau» de SRF, où elle a ensuite travaillé comme enquêtrice. En tant que membre d’un trio de recherche, elle a participé aux Cryptoleaks, une enquête commune de «Rundschau», ZDF et Washington Post qui a révélé une opération d’écoute à l’échelle mondiale, menée par les services secrets américains et allemands.

Peterhans a ensuite effectué un stage au Tages-Anzeiger dont elle a intégré la cellule enquête en 2022. Avec son équipe, elle y a notamment publié les Cyprus Confidentials, qui ont exposé d’innombrables liens entre des oligarques russes et des banques suisses. En 2024, Anielle Peterhans a reçu un «Swiss Press Award» dans la catégorie Online. Elle a été récompensée pour une enquêtemenée avec Patrick Meier, Oliver Zihlmann, Simone Rau et Sebastian Broschinski et portant sur l’hostilité à l’égard des membres du parlement

«Les forces unies sont de plus en plus importantes»

«Je me réjouis énormément de pouvoir participer à investigativ.ch, afin que des journalistes engagés puissent se mettre en réseau et collaborer dans toute la Suisse», déclare Peterhans. «Car des forces unies – non seulement au-delà des rubriques, mais aussi au-delà des entreprises de médias – deviennent de plus en plus importantes si nous voulons faire bouger les choses dans notre monde. Et c’est ce que nous voulons toutes et tous»!

Cathrin Caprez, co-présidente d’investigativ.ch et rédactrice scientifique à la SRF: «Nous sommes très heureux d’accueillir Anielle, une collègue aussi engagée, au sein du comité d’investigativ.ch. Elle apporte une expérience impressionnante – et donc certainement beaucoup d’inputs et d’idées cools».

Anielle Peterhans succède à Timo Grossenbacher. Timo Grossenbacher quitte le comité après quatre ans, car il souhaite donner une nouvelle orientation à sa carrière et s’attaquer à de nouveaux projets. Il reste membre d’investigativ.ch. Marc Meschenmoser a également démissionné lors de l’assemblée générale, car il quitte le journalisme pour relever un nouveau défi professionnel. investigativ.ch les remercie tous deux pour leur grand engagement en faveur de l’association.

Apéro d’enquête avec Anielle Peterhans

Afin que les membres d’investigativ.ch puissent faire connaissance avec la nouvelle membre du comité, un apéro d’enquête aura lieu le 25 juin à 18 heures chez Tamedia. Anielle Peterhans, Oliver Zihlmann et Christian Brönnimann donneront un aperçu de la recherche collaborative autour de Cyprus Confidentials.

Les apéros d’enquête d’investigativ.ch offrent une esquisse des coulisses d’une enquête actuelle et très discutée. L’apéro qui suivra sera l’occasion d’échanger sur l’enquête et de faire du réseautage. Infos et inscription (exclusivement pour les membres d’investigativ.ch).

Retour sur la conférence annuelle 2024

Comment les journalistes naviguent dans la zone grise – et font sauter les barrières: C’est sur ce thème que s’est tenue la grande conférence annuelle de investigativ.ch le vendredi après-midi, 24 mai 2024, à Berne. Cette année, le réseau d’enquête s’est consacré à un sujet controversé: le journalisme undercover.

Photos: Ⓒ Raphael Hünerfauth

Dans quelles conditions les journalistes peuvent-ils mener des enquêtes sous couverture? Qu’est-ce qui est autorisé du point de vue juridique et de l’éthique des médias? Comment les reporters peuvent-ils s’inspirer des méthodes des enquêteurs, des vérificateurs de comptes et des experts judiciaires? À ces questions s’est consacré le réseau d’enquête investigativ.ch lors de la conférence annuelle. À Berne, un programme bilingue (allemand et français) attendait les participants avec des invités de haut niveau, des ateliers instructifs et des discussions controversées.

L’événement a été ouvert par Jean Peters de CORRECTIV Allemagne. Il a dirigé l’enquête «Plan secret contre l’Allemagne», qui a déclenché une des plus grandes vagues de manifestations de l’histoire de l’Allemagne. Plus de trois millions de personnes sont descendues dans la rue dans les semaines qui ont suivi pour se positionner contre l’extrême droite. Comment l’enquête a-t-elle été menée? Quelles en ont été les conséquences? Et comment CORRECTIV a-t-il été attaqué par la suite? Jean Peters, qui était sur place à Potsdam, a offert un aperçu des coulisses de l’enquête.

Dans les ateliers qui ont suivi, des professionnels des médias d’investigation ont transmis des conseils pratiques précieux et des idées sur les méthodes de recherche. Ainsi, le journaliste Conradin Zellweger de SRF Investigativ et Barbara Lehmann du service juridique de SRF ont parlé des tournages délicats avec une caméra cachée – que ce soit chez des «citoyens du Reich», dans un club de poker illégal ou sur un bateau où des réfugiés étaient enfermés.

Dans un atelier dirigé par Timo Grossenbacher (anciennement Tamedia), nous avons fait le point sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le journalisme. Les membres de investigativ.ch ont donné des conseils et montré comment ils utilisent l’IA dans leurs propres enquêtes.

Dans le cadre de leurs enquêtes sur les cas d’abus dans l’Église catholique, les journalistes se heurtent souvent à des obstacles. L’enquête de François Ruchti de la RTS sur les abus commis par des chanoines de l’abbaye de Saint-Maurice a fait parler d’elle. Des images prises par une caméra cachée y ont également été utilisées – réalisées non par le journaliste, mais par une victime. Otto Hostettler du Beobachter a mis en lumière des cas d’abus dans le diocèse de Bâle et au couvent d’Einsiedeln. Il s’aventure au-delà des frontières du journalisme en soutenant les victimes dans leurs démarches. Eva Hirschi a discuté avec eux des défis rencontrés.

Une autre discussion d’atelier s’est consacrée aux recherches dans des domaines où les compétences journalistiques sont également sollicitées. Nicole Meier, rédactrice en chef du service germanophone de Keystone-SDA jusqu’à fin mai, travaillera bientôt à temps partiel avec la police à l’aéroport de Zurich. Et Alexandre Haederli, expert en audit auprès du Contrôle fédéral des finances, était auparavant journaliste d’investigation chez Tamedia. Sven Altermatt les a interrogés.


L’enquête sous couverture est un exercice d’équilibre juridique. Quelles sont ses limites? De quoi les journalistes doivent-ils tenir compte? Eva Hirschi a parlé des opportunités et freins de la recherche sous couverture avec un panel d’invités de haut niveau: Susan Boos (Conseil suisse de la presse), Sarah Jäggi (Die Zeit) et Jean-Philippe Ceppi (RTS et auteur d’un livre sur l’histoire de la caméra cachée dans le journalisme TV).

La conférence annuelle s’est conclue, comme chaque fois, par notre apéritif de réseautage très apprécié. Nous sommes ravis de l’intérêt considérable et des échanges animés!

Une enquête soutenue par investigativ.ch récompensée par le «Swiss Press Award»

Matthias Niederberger et Fabian Duss ont été élus vendredi «Swiss Press Journalists of the Year». Nous les félicitons chaleureusement! Les deux journalistes du canton de Schwyz ont publié un article sur les décisions arbitraires lors des entretiens de naturalisation dans le journal local «Freier Schweizer».

Ils ont voulu connaitre les questions auxquelles doivent répondre les personnes qui veulent se faire naturaliser dans le canton de Schwyz. En vertu de la loi sur la transparence, ils ont demandé aux communes de Schwyz de leur fournir des informations sur le processus de naturalisation et de leur donner accès à la liste des questions utilisées pour tester les candidats à la naturalisation. Ils se sont heurtés à l’attitude défensive de l’administration, à des arguments trompeurs et à des délais d’attente interminables.

Cette enquête a été soutenue financièrement par le «Fonds d’enquête d’investigativ.ch / Daniel Brunner». Cette deuxième cagnotte de notre fonds d’enquête a pour objectif de promouvoir les recherches dans le journalisme local et régional en Suisse centrale et à Zoug. Outre la focalisation géographique, les conditions sont les mêmes que pour «investigativ.ch: Fonds d’enquête de la Fondation Gottlieb et Hans Vogt».

Soutien pour ton enquête

Tu es journaliste et tu as également besoin d’aide pour ton enquête? Alors soumets ta demande dès maintenant. Depuis 2019, le fonds financé par la Fondation Gottlieb et Hans Vogt encourage les enquêtes journalistiques à échelle  locale et régionale. Depuis 2022, ce fonds est complété par un montant pour la Suisse centrale et Zoug, le «Fonds d’enquête d’investigativ.ch / Daniel Brunner».

Les journalistes ou les rédactions qui souhaitent mener une enquête locale ou régionale en Suisse peuvent déposer une demande. Le fonds accorde jusqu’à 1500 francs pour un financement préliminaire et 6000 francs maximum de soutien à la réalisation d’une enquête. De plus, les journalistes ont accès à un coaching par une personne expérimentée du réseau d’investigativ.ch.

Tu trouveras ici toutes les conditions ainsi que le règlement du fonds. Nous nous réjouissons de recevoir ta demande!